Le massage tibétain Ku Nyé

En matière de massage thérapeutique, nous avons connaissance de nombreuses techniques qui se sont démocratisées, comme le massage ayurvédique (surtout le massage Abhyanga), le Shiatsu, la réflexologie plantaire et bien d’autres. Mais le massage tibétain, nommé Ku Nyé, reste peu connu. Le massage Ku Nyé « est né de l’observation de la nature, de la philosophie et de la spiritualité du bouddhisme tibétain ». Ce soin thérapeutique est une méditation en lui-même et selon une approche holistique, il comprend l’Etre dans sa globalité en oeuvrant sur le lien corps-esprit à travers les énergies subtiles. Véronique Giard, praticienne certifiée, a un parcours atypique qui assoie sa maitrise de la méditation bouddhique durant les soins qu’elle pratique. C’est après avoir vécu 5 ans et demi dans un monastère bouddhiste, comprenant 3 ans de retraite méditative, que Véronique se forme au massage tibétain et obtient le certificat de praticienne Ku Nyé, de l’institut Shang Shung. Elle nous fait l’honneur de répondre à nos questions concernant sa pratique du massage thérapeutique tibétain. Tout d’abord, que signifie le terme KuNyé en tibétain ? Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur l’origine de ce massage thérapeutique ? Littéralement Ku signifie « pratiquer » ou appliquer sur le corps des huiles pour calmer le corps et l’esprit. Nye se réfère aux techniques de massages propres, comme le frottement, la friction et la pression des muscles et des tendons, ainsi que l’utilisation de la pression sur des points et des canaux précis. Le massage tibétain est une tradition autochtone d’origine ancestrale. Il a presque 4000 ans. Dès l’âge de pierre, en observant la nature, les Tibétains ont découvert les propriétés thérapeutiques des aliments et des boissons. Ils ont également étudié le comportement des animaux, leurs manières de se soigner en utilisant certaines herbes et plantes jusqu’à établir, les premières approches thérapeutiques. Mais l’origine du Ku Nyé se trouve aussi dans la découverte de la dimension énergétique et mentale de l’homme. Les yogis pendant leurs pratiques de méditations ont eu des expériences et des visions du système énergétique (canaux et points). Tous ces savoirs ont été consignés dans un texte de médecine tibétaine, le Bum Shi. Dans ce texte apparaissent tous les principes fondamentaux de la médecine Tibétaine. Le massage y est présenté comme l’une des principales thérapies externes. Ces connaissances et leur diffusion se sont transmises au cours des siècles jusqu’à nos jours. 2. Quels sont les bienfaits de ce soin tibétain, au niveau du corps mais aussi de l’esprit ? Sur quelles problématiques agit-il en particulier ? Ce soin tibétain a pour objectif de maintenir ou de rétablir l’équilibre énergétique de l’individu. Le niveau énergétique est l’intermédiaire, le pont entre le corps et l’esprit. Ainsi, il peut agir sur ces trois niveaux. L’énergie perturbée perturbe les émotions, (et si l’esprit ne parvient pas à lâcher) les émotions perturbent le corps. Comme en Ayurveda, on retrouve au niveau énergétique les cinq éléments qui imprègnent autant la dimension externe, l’univers dans lequel nous vivons, que la dimension interne de notre corps. A partir de ces 5 éléments (espace, air, feu, terre et eau), se manifestent trois humeurs.
  • L’air est appelé humeur du vent : Loung en tibétain
  • Le feu est appelé : Tripa en tibétain
  • La terre et l’eau sont regroupées et donnent en tibétain l’humeur : Békèn.
  • L’espace est le milieu dans lequel évoluent les quatre autres.
Au niveau du corps, Il détend profondément et permet de relâcher les tensions. Au niveau énergétique, il revitalise. Le travail sur les canaux et les points permet une meilleure circulation de l’énergie. Au niveau de l’esprit, il recentre, donne l’espace à une expérience de lâcher-prise et génère une grande sérénité intérieure. Ses bienfaits rajeunissants et reconstituants sont mentionnés dans de nombreux textes originaux tibétains. Il est particulièrement préconisé pour les dérèglements en lien avec l’énergie du vent (insomnies, stress et déséquilibres nerveux, céphalées). Il est également très efficace pour les maux de dos, les douleurs articulaires et musculaires. 3. Quelle est la place de la méditation dans la pratique de ce soin ? Est-il nécessaire d’être un pratiquant pour recevoir le massage tibétain KuNyé ? A qui s’adresse t-il ? C’est sans doute une vue liée à mon parcours mais je ne peux pas séparer la méditation du soin. J’associe la pratique du Ku Nyé à la méditation du calme mental Shiné, disposition d’esprit nécessaire à l’attention et à la bienveillance à donner à la personne reçue en séance. Il n’est pas nécessaire d’être un pratiquant pour recevoir ce massage. Il peut apporter de grands bienfaits à toute personne qui s’y intéresse. Il est cependant important d’avoir l’ouverture d’esprit et la confiance. Sur cette base, un lien se tisse entre le praticien et le massé et c’est grâce à ce lien que les bienfaits de la tradition tibétaine passent. Un peu d’ouverture et de confiance suffisent ! Il s’adresse donc au plus grand nombre. 4. La bienveillance et la compassion sont des valeurs fondamentales de la philosophie et de la pratique du bouddhisme. Sont-elles les valeurs du massage KuNyé ? Comment s’expriment-elles ? On ne peut pas dissocier le massage Ku Nyé des valeurs fondamentales de la philosophie et de la pratique du bouddhisme. A mon sens, le praticien doit entrer dans ce courant, faire un travail intérieur sur lui-même, développer des qualités, se relier aux qualités d’êtres ayant déjà parcouru et réalisé ce chemin (les Bouddhas). Il n’est bien sûr ni éveillé, ni supérieur mais relié à cette tradition dont il s’inspire. Je ne crois pas que l’on puisse de manière sincère et authentique s’engager dans la voie du bienfait des autres sans réfléchir et méditer sur la bienveillance et la compassion. Ces valeurs s’expriment il me semble à travers l’attention (corps-esprit) accordée à l’autre : l’écoute pour mieux cerner les déséquilibres et les besoins mais aussi à travers les gestes effectués en pleine conscience. 5. D’une manière générale, comment se déroule un massage tibétain avec vous ? Le massage tibétain commence toujours par un temps d’échanges qui permet de mieux cerner les déséquilibres énergétiques. Le Ku Nyé n’a pas un protocole fixe. Je choisis les techniques en fonction des besoins de la personne pendant ce temps. La séance peut inclure un temps de relaxation – méditation si nécessaire avant ou pendant. Le massage dure traditionnellement entre 1h15 et 1h30. Les techniques peuvent varier (points énergétiques, application de compresses chaudes ou fraîches ; des pierres chauffées ou refroidies ; « Hormé » des petits pochons d’épices trempés dans l’huile chauffée appliqués sur certains points ; le « Chi » nettoyage à la farine de pois chiche…) La séance se termine dans le même esprit autour d’une infusion. Je donne à ce moment là quelques conseils utiles pour intégrer les bienfaits du soin et pour aider la personne sur son chemin. C’est avec beaucoup de gratitude que nous remercions Véronique Giard pour son éclairage sur ce thème du massage tibétain Ku Nyé et les précieuses informations qu’elle nous a transmis sur cette pratique thérapeutique.